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Au Nom de l'Harmonie, tome 4 : Souffle de Vie Partie 1 - Chapitre 2

Photo du rédacteur: Olivia SunwayOlivia Sunway

— Jason et sa bande de copains sont là-bas, continua Carole, confirmant mes soupçons. On va les rejoindre ?

Je haussai les épaules et acceptai. Je savais que ma sœur avait besoin de s’amuser, alors je me levai pour la suivre. C’est à cet instant que la pièce fut soudain plongée dans le noir. La musique se coupa et j’entendis les gens commencer à paniquer. Je n’étais pas très à l’aise non plus, mais je fis de mon mieux pour rester calme.

— Qu’est-ce qui se passe ? demandai-je à Carole en essayant de me rapprocher d’elle.

— J’en sais rien, répondit-elle alors que je trouvais sa main et que je la prenais dans la mienne.

Plusieurs portables s’allumèrent tandis que des bruits de verres qui se brisent me parvenaient. J’en profitai pour attraper mon téléphone et activer la lampe torche.

— Viens, on sort, dis-je à ma sœur en l’entraînant avec moi.

— OK, accepta-t-elle en récupérant son sac à main.

Nous nous frayâmes un chemin vers la sortie ou, du moins, le coin fumeurs qui était balisé sur le trottoir par de petites barrières. Dehors, les lampadaires éclairaient toujours le parking, ce qui apaisa mon angoisse. J’aurais voulu en savoir plus, mais l’un des vigiles qui surveillaient le coin fumeurs était déjà assailli de questions auxquelles il n’avait apparemment aucune réponse. Carole en profita pour allumer une cigarette. Et, comme par hasard, Jason nous rejoignit quelques minutes plus tard.

Cette fois, il était accompagné de ses amis. Nous échangeâmes quelques banalités tandis qu’il se rapprochait de Carole. Je savais que j’aurais dû prendre part aux conversations et essayer de sympathiser avec ses amis, mais je n’y arrivais pas.

Mon regard dériva vers l’entrée du club, à l’autre bout du trottoir. Je fixai un homme qui était au téléphone et l’observai machinalement. Il raccrocha et ses yeux croisèrent les miens. Du moins, j’en eus l’impression…

Il s’élança droit sur nous à petites foulées, ce qui me fit froncer les sourcils. Lorsqu’il n’y eut plus que quelques mètres qui nous séparaient, je le reconnus...

Mon corps devint soudain engourdi et mon cœur se mit à tambouriner dans ma poitrine. Mes jambes commencèrent à trembler.

Bon sang, c’est Morgan !

— Patricia ?! hurla-t-il à l’assemblée.

Mon cœur se serra douloureusement en constatant qu’il ne m’avait pas vue et qu’il cherchait une autre femme…

En temps normal, je serais probablement restée plantée là à le voir s’en aller mais, ce soir, une force invisible (probablement la partie de mon subconscient qui me donnait l’impression que je n’avais pas fait assez d’efforts pour le retrouver et, aussi, le peu d’alcool que j’avais dans le sang) me fit enjamber la petite barrière métallique. Je me retrouvai sur le trottoir, en talons hauts, plutôt bien habillée et avec un maquillage de soirée, face à Morgan dont j’avais attiré l’attention.

— Morgan ? l’interpellai-je, malgré mon cœur qui battait à cent à l’heure et mes jambes en coton.

J’étais sur le point de m’écrouler.

Cette fois, c’est lui qui ne sembla pas me reconnaître et cela m’attrista encore plus. Il fronça les sourcils en s’approchant un peu de moi.

— C’est Vicky…, murmurai-je.

— Vicky ? répéta-t-il en me détaillant de la tête aux pieds.

— Ouais… tu ne me reconnais pas ? ironisai-je.

Ses yeux dérivèrent une nouvelle fois vers la foule derrière moi et je pris cela pour un échec. Je faillis retourner voir ma sœur, mais Morgan avança d’un nouveau pas vers moi, se retrouvant à moins d’un mètre de mon corps tremblant.

— Si, je te reconnais, répondit-il avec un temps de retard. Tu n’aurais pas vu une grande rousse ? Elle s’appelle Patricia…

Et, cette fois, ce ne fut pas le coup de foudre qui me percuta, mais une véritable douche froide. Comment avais-je pu espérer qu’un homme comme lui m’attendrait ? Ou resterait célibataire jusqu’à ce que je le retrouve ?

— Non, désolée…, répliquai-je d’une voix presque inaudible.

J’aurais dû le laisser chercher cette femme, mais l’attirance que j’avais pour Morgan était trop forte pour que j’en reste là. J’avais passé des heures, des jours, des mois entiers à essayer de le retrouver, à appeler des tonnes de Morgan Thomas, sans jamais réussir à tomber sur lui… Alors, maintenant que je l’avais en face de moi, je ne pouvais pas le laisser partir comme ça.

Il fit demi-tour et retourna d’un pas rapide d’où il venait. Je le suivis maladroitement avec une désagréable impression de déjà-vu.

— J’ai essayé de te retrouver après cette rencontre à la supérette, lâchai-je sans réussir à retenir mes paroles.

Morgan s’arrêta net et me dévisagea, ne laissant rien transparaître.

— Mais tu admettras que ton nom est assez commun…, ajoutai-je en essayant de sourire. J’ai dû appeler des milliers de Morgan Thomas, sans jamais tomber sur toi…

Voilà, il savait maintenant...

J’étais sur le point de m’écrouler après cet aveu qui ne semblait pas le dérider. Nous étions seuls près de la petite ruelle à l’angle du club.

— Ne t’approche pas de la ruelle, d’accord ? dit-il d’une voix un peu autoritaire, comme s’il ne m’avait pas entendue.

Sa voix se répercuta dans tout mon corps. J’allais lui demander pourquoi quand son téléphone sonna. Il me scruta un instant avant de décrocher sans jamais me quitter des yeux. Ils étaient durs et froids, ce qui m’arracha un nouveau frisson. Mais, cette fois, ce n’était pas dû à l’excitation…

— Lieutenant Morgan, dit-il en décrochant. Je suis avec une civile.

Je n’en croyais pas mes oreilles.

Morgan est flic ?

Il écouta son interlocuteur avant d’ajouter :

— Oui, la tête coupée. Il y a du sang partout. C’est un vrai carnage, ici…

L’inquiétude et la peur m’étreignirent en entendant ses paroles.

— D’accord, je reste sur les lieux en attendant l’équipe, ajouta Morgan avant de raccrocher.

Il me fixait toujours et ses yeux s’adoucirent légèrement.

— Tu n’aurais pas dû entendre ça…, lâcha-t-il contrarié. Je n’étais pas en service, ce soir...

— Il y a eu un meurtre ? m’inquiétai-je, terrorisée.

Morgan s’apprêtait à me répondre quand quelqu’un nous interpella.

— Hey ! Toi, là, donne-moi ton fric ! hurla un homme derrière moi.

Je tournai la tête pour découvrir un genre de clochard qui tenait un couteau rafistolé à la main. Il était bourré de tics nerveux et semblait extrêmement agressif.

— Ne bouge surtout pas, m’intima Morgan en attrapant discrètement mon poignet.

Outre la situation critique, ce contact me paralysa une seconde. Mon corps fut parcouru d’une décharge électrique. Je ne savais plus si mon cœur battait de terreur ou d’excitation.

— Je vais vous donner tout ce que j’ai, répondit Morgan en ouvrant doucement sa veste.

L’homme regardait dans tous les sens et semblait hyper stressé. À l’endroit où nous étions, personne ne pouvait nous voir. Carole et les autres fumeurs étaient beaucoup trop loin pour comprendre ce qui se passait.

— Dépêche-toi ! cria-t-il en agitant son couteau.

Morgan resta très calme et sortit lentement son portefeuille, mais j’avais l’impression qu’il analysait notre agresseur. Puis, tout se passa très vite. Morgan fondit sur le clochard pour tenter de le désarmer. Je hurlai, de peur qu’il ne lui arrive quelque chose.

Morgan lâcha un râle sourd et tituba en arrière. Je vis le couteau planté dans son ventre et me jetai à corps perdu entre les deux hommes, sans réfléchir. Je réussis à poser ma main sur le couteau pour tenter de secourir Morgan, mais le type louche me poussa violemment sur le côté et je me coupai le doigt. Un cri de douleur m’échappa.

Le clochard retira son arme sanguinolente du ventre de Morgan, attrapa le portefeuille et partit en courant.

Morgan s’écroula sur le trottoir et je me précipitai vers lui. La main qu’il avait posée sur sa blessure était couverte de sang, ce qui me fit paniquer.

— APPELEZ UNE AMBULANCE !!! hurlai-je en m’agenouillant à ses côtés.

J’entendis plusieurs personnes nous rejoindre et s’affoler autour de nous, mais je n’arrivais pas à détacher mes yeux de Morgan qui semblait souffrir le martyre.

— Putain, Morgan ! lâchai-je en sentant mes larmes commencer à couler. Ça va aller…

Son regard bleu était intense et je fis de mon mieux pour le rassurer.

— L’ambulance va bientôt arriver. Tu dois tenir le coup... Tu ne peux pas me quitter alors que je viens tout juste de te retrouver… J’ai eu le coup de foudre, tu comprends ? Il y a un an dans cette supérette, j’ai eu le coup de foudre quand tu es venu me parler. Alors, tu ne peux pas me laisser. Tu hantes mon esprit jour et nuit depuis ce jour, débitai-je à toute allure.

Je serrai sa main dans la mienne alors qu’il me dévisageait sans me répondre. J’avais peur, je me sentais complètement démunie. La tristesse et la panique qui m’envahissaient me firent pleurer de plus belle.

Puis, je sentis quelque chose de bizarre à l’intérieur de mon corps. Une douce chaleur qui se répandait en moi. Mes mains devinrent de plus en plus chaudes. Je ne comprenais pas ce qui m’arrivait, mais mon instinct m’intima de poser mes mains sur la blessure de Morgan. Alors je l’écoutai.

En pleurs, entourée d’une multitude de personnes, je fis ce que mon cœur réclamait. Je pris appui sur mes jambes, déplaçai la main de Morgan qui était toujours posée sur sa blessure et la remplaçai par les miennes. Il me dévisageait toujours avec ce regard crispé par la douleur qui me retournait l’estomac. La chaleur se déversa dans le corps de Morgan et je ressentis une violente douleur dans le ventre. Une douleur insupportable qui me paralysa sur place. Ma tête se mit à tourner et mes membres devinrent tellement engourdis que je m’écroulai sur Morgan avant de perdre connaissance.



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