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Working Love - Chapitre 2

En rentrant chez lui, Martin se demanda s’il n’était finalement pas en train de tout gâcher avec Jessica. Cela faisait maintenant six mois qu’il essayait par tous les moyens d’attirer son attention. Mais il fallait l’avouer, il était un peu maladroit dans son genre.

Lisandro lui avait toujours affirmé que les filles aimaient les mecs machos et sûrs d’eux. Seulement, cela avait apparemment l’effet totalement inverse sur Jessica, bien qu’il s’efforce d’appliquer les conseils de Lisandro à la lettre.

D’ailleurs, il avait justement rendez-vous avec ce dernier dans à peine une heure.

Il prit une douche, se parfuma sans modération, puis s’habilla avec un jean délavé et une chemise dont il retroussa les manches sur ses avant-bras. Un style de tombeur d’après les dires de son ami. Enfin, jusqu’à présent, il n’avait décroché aucun rencard habillé de la sorte…

Martin commençait à remettre en cause les conseils de Lisandro. Si ce dernier réussissait à sortir avec une flopée de nanas toutes les semaines, ce n’était peut-être pas grâce à sa conversation, mais plutôt à son physique de beau gosse. Il fallait se rendre à l’évidence, Martin était loin de lui ressembler et toutes ses inepties de réparties et de blagues graveleuses ne lui avaient, pour l’instant, pas servi du tout. C’était même le contraire…

Martin retrouva Lisandro au Bureau de Sainte-Geneviève-des-Bois, un pub assez sympa. Il rejoignit son ami à la petite table qu’il occupait déjà en sirotant un whisky coca. L’ambiance était un peu bruyante avec la musique de fond et les clients qui discutaient, formant un brouhaha typique de ce genre de lieu.

— Salut, mec. T’en fais une tête…, l’accueillit Lisandro qui arborait toujours de belles chemises et une coupe de cheveux coupés court parfaitement coiffés.

Lisandro était espagnol et, quelque part, Martin l’enviait pour son charisme naturel. Cela lui permettait d’attirer l’attention de n’importe qui sans faire d’effort.

— J’ai l’impression qu’elle me déteste, enchaîna Martin en se glissant sur la banquette en face de Lisandro.

— C’est qu’elle est sur le point de craquer ! affirma Lisandro en lui donnant une petite tape sur l’épaule. T’en fais pas, c’est une question de jour maintenant. Tu sais ce qu’on dit ? « La haine est parfois proche de l’amour ».

Et il s’esclaffa, attirant l’attention de plusieurs personnes alentour.

— Je n’en suis pas si sûr…

— Mais si, crois-en mon expérience ! Tiens, regarde celle-là au bar.

Lisandro désigna une petite brune qui portait une robe noire ultra sexy et Martin hocha la tête.

— Elle semble douce et adorable mais, en réalité, c’est une vraie furie. La première fois qu’elle m’a regardé comme si elle allait me sauter à la gorge, on a baisé comme des bêtes pendant des heures !

— C’est une de tes ex, si je comprends bien.

— Ouais… disons plutôt un coup d’un soir qui a duré quelques jours, mais elle était insupportable.

— Je vois, mais on s’éloigne un peu du sujet, là. Qu’est-ce que je dois faire pour Jessica ?

— Invite-la à dîner.

— T’es sûr ?

— Mais oui, elle est à point ! Et te prends pas trop la tête, on est entourés de jolies femmes tu n’as que l’embarras du choix alors, pourquoi tu t’obstines à perdre ton temps avec elle ?

— Parce que c’est elle que je veux ! Je n’ai pas vraiment d’explication, mais cette nana me rend dingue. Elle hante mes pensées jour et nuit, tu comprends ?! Tu devais m’aider, Lisandro ! Je suis nul en drague et tu le sais.

— Écoute, fais ce que je te dis et tu seras fixé.

— C’est tout ? Juste comme ça ? Elle va me rire au nez, tu ne la connais pas…

— Essaie, c’est tout ! le rabroua Lisandro en regardant toutes les nanas alentour, sans vraiment prêter attention à la conversation.

— En fait, tu t’en fiches royalement…

Lisandro tourna la tête vers son ami, l’air un peu blasé.

— C’est juste que je ne comprends pas ton obstination pour cette femme.

— Tu comprendras le jour où tu tomberas amoureux, mec !

Lisandro s’esclaffa encore bruyamment.

— Ça, c’est pas demain la veille et ne me dis pas que tu es amoureux de ta collègue. Vous n’avez même pas couché ensemble !

— L’amour ne se résume pas au sexe, contrairement à ce que tu penses.

Lisandro lui jeta un regard réprobateur.

— Tu parles comme une gonzesse. Fais gaffe…

Martin resta encore une petite heure avec son ami, puis finit par rentrer chez lui. Il ne savait plus trop quoi penser des conseils de Lisandro. Pourtant, il décida de continuer encore quelques jours pour voir si son ami avait raison. Peut-être que Jessica était effectivement en train de le considérer comme un potentiel petit ami.


Dès le lendemain, Martin se rendit à son travail avec un nouvel espoir au fond du cœur. Comme à chaque fois, au moment où il franchit la porte du bureau, la merveilleuse odeur de Jessica le percuta de plein fouet. Son désir pour elle était chaque jour un peu plus fort.

Elle était déjà absorbée dans son travail. Martin prit une grande inspiration et s’encouragea mentalement, avant de s’approcher d’elle.

— Salut, dit-il fermement. J’ai besoin d’un café !

Elle leva ses yeux gris vers lui, le foudroyant du regard.

— Et alors ? lâcha-t-elle froidement.

­­— Alors, je ne vois qu’une seule femme ici. Et tout le monde sait que servir le café est un rôle de femme, continua Martin en faisant un signe vers la porte pour inciter sa collègue à l’écouter.

En entendant cela, Jessica faillit péter les plombs ! Elle ne s’était encore jamais rabaissée à servir un homme ! Toutefois, elle était prête à faire quelques concessions avec Martin. S’il pouvait la laisser tranquille rien qu’une journée…

— Si j’accepte, est-ce que tu me laisseras tranquille le reste de la journée ? demanda-t-elle prudemment.

Martin la fixa un instant, sans trop savoir quoi répondre. Il était absorbé par les lèvres rouge rubis de Jessica. Une couleur qui les rendait tellement pulpeuses que Martin avait toujours du mal à se concentrer. Et c’était bien la première fois que Jessica essayait de négocier avec lui. Il pensait que c’était une bonne chose, mais il devait tout de même garder la tête froide. Pourtant, un infime espoir réchauffa son cœur.

Lisandro a peut-être raison finalement…

— Je ferai mon possible, répondit enfin Martin.

— Bien, répliqua Jessica en se levant et en lissant sa jupe crayon parfaitement repassée.

Elle passa devant Martin avec hâte, malgré ses talons aiguilles de dix centimètres, et se rendit jusqu’à la machine à café. Elle sélectionna le café soluble, car elle savait qu’il était infâme, et ne mit aucun sucre.

Ça lui fera les pieds à cet idiot !

Elle revint à son bureau avec la tasse fumante et à l’instant où elle la déposa dans les mains de Martin, elle repensa au plan diabolique de sa cousine.

Martin et Jessica se fixèrent un instant dans les yeux avec des idées totalement différentes à l’esprit. L’un croyant que son plan était en train de fonctionner et l’autre préparant sa vengeance…

— Merci, chère collègue, dit Martin, un peu troublé par les magnifiques yeux gris de Jessica.

Cette dernière leva la main pour le faire taire.

— Plus un mot à partir de maintenant. C’était le marché.

Martin acquiesça en silence et s’installa à son poste, un petit sourire au coin des lèvres. Petit sourire que Jessica aurait bien fait disparaître à l’aide d’une gifle !

Et c’est à cet instant précis qu’elle décida qu’il était temps d’agir…

À l’heure du déjeuner, Jessica attendit que Martin parte manger pour contacter sa cousine. Charline était en plein tournage et ne pouvait pas vraiment discuter. Mais lorsque Jessica lui donna son accord pour son plan, Charline prit quelques minutes pour qu’elles se mettent au point. Ce qui étonna encore plus Jessica, c’est que tout était déjà prêt. Jessica devait juste récupérer un somnifère chez sa cousine le soir même.


Jessica était un peu nerveuse lorsqu’elle sonna chez sa cousine. Sa maison était immense et les grilles en fer forgé noir l’intimidaient un peu. Le portail s’ouvrit lentement, alors que Charline ouvrait la porte d’entrée pour faire signe à Jessica de la rejoindre. Cette dernière se dépêcha de traverser l’allée de gravier en essayant de ne pas tomber ni d’abîmer ses escarpins.

Charline faisait dans les un mètre soixante et avait une longue chevelure châtain clair qu’elle rassemblait souvent en une longue natte sur son épaule. Ses yeux d’un bleu pur lui donnaient un charme ravageur. Elle faisait un bon trente-huit et sa silhouette était bien proportionnée. Une poitrine généreuse et des fesses bien rebondies qui faisaient toujours un effet dévastateur sur les hommes.

­— Salut Jess ! s’exclama Charline avec un grand sourire, avant de la prendre dans ses bras.

Jessica rendit son étreinte à sa cousine avec plaisir.

— Salut, Chacha, répliqua-t-elle aussitôt.

— Allez, viens, entre, continua Charline en l’entraînant dans son immense salon. Tu veux boire quelque chose ? J’ai du thé glacé.

— C’est parfait, répondit Jessica en s’asseyant sur le canapé moelleux.

Charline revint avec deux verres bien frais et prit place à côté de Jessica. Elle attrapa ensuite la boîte de médicaments qui se trouvait sur la table basse en teck.

— Bon, parlons de notre plan, reprit Charline sans perdre une minute.

Charline était vraiment excitée de faire un truc aussi fou.

— Tu lui en donnes un demi-comprimé, d’accord ?

Jessica hocha nerveusement la tête en prenant la petite boîte en carton.

— Ça a quel goût ? demanda-t-elle, anxieuse.

— Dissous dans du café, il ne le sentira même pas, répliqua Charline avec un clin d’œil.

Jessica acquiesça silencieusement. Cela ne lui ressemblait pas d’être aussi muette, mais savoir qu’elle allait commettre un délit l’inquiétait.

— Détends-toi, Jess. Tout se passera bien, rigola Charline.

— C’est facile pour toi, se plaignit Jessica. Tu ne risques pas ton job…

— En fait, si, un peu. Mais tu sais, si Christian voulait te mettre à la porte, il l’aurait fait depuis longtemps avec tout ce que tu lui fais subir.

— C’est pour ça qu’il a embauché ce type, réalisa Jessica. Pour me rendre folle et se venger !

Charline haussa les épaules.

— C’est possible.

— Lui aussi mériterait une bonne leçon ! lâcha Jessica.

— Quelque chose me dit que tu vas prendre goût à mes expériences en studio, se moqua Charline, ce qui fit redescendre Jessica sur terre.

— Ce n’est pas ce que je voulais dire.

Pour toute réponse, Charline se contenta d’observer sa cousine. Puis, elle décida qu’il était temps de se détendre devant un bon film de science-fiction, ou en tout cas, un film qui demandait un énorme travail d’effets spéciaux.

— On se refait les Aliens ? demanda Charline.

— Encore ? soupira Jessica. Pourquoi pas un bon film romantique ?

Charline leva les yeux au ciel, avant de lancer sa saga préférée.


Le lendemain matin, dès que son réveil sonna, Jessica eut un peu de mal à émerger. Elle était rentrée tard. Elle se leva difficilement, prit une douche rapide et se prépara tel un robot. Il était plus tôt que d’habitude et il fallait qu’elle arrive avant Martin pour dissoudre le somnifère dans son café.

Lorsqu’elle entra dans son entreprise, les employés ne la virent même pas arriver et elle en profita pour se ruer dans le couloir des bureaux administratifs. Elle serra nerveusement son sac à main en se dirigeant à son poste. Elle déposa ensuite ses affaires sur sa chaise, puis sortit la petite boîte de somnifères et en cassa un en deux. Elle reposa une moitié dans la boîte et garda l’autre au creux de sa main, avant de tout ranger dans son sac. Puis, elle se dirigea vers la machine à café en salle de pause.

Heureusement, il n’y avait encore personne à cette heure-ci. Jessica se dépêcha d’appuyer sur les touches et sélectionna une bonne dose de sucre, cette fois-ci. Enfin, elle récupéra le gobelet brûlant et y fit tomber le comprimé. Elle mélangea vigoureusement le café en priant pour que le médicament fonde rapidement. Avec anxiété, elle rejoignit son bureau, les yeux rivés sur la boisson chaude qu’elle continuait de touiller. Elle espérait vraiment que ce truc passerait inaperçu et n’aurait pas un goût bizarre.

— Salut ! C’est pour moi ? demanda Martin qui venait tout juste d’arriver.

Jessica sursauta en remarquant son collègue. Elle ne s’y était pas attendue et elle eut soudainement quelques doutes. Comme par acquit de conscience, elle se demanda si ce qu’elle s’apprêtait à faire était vraiment une bonne idée. Mais Martin ne lui laissa pas le temps de réfléchir, il lui prit le gobelet des mains avec un sourire suffisant.

— Tu apprends vite, continua-t-il avec un clin d’œil qui irrita Jessica au plus haut point.

À cet instant précis, elle n’eut plus aucun doute.

— Et j’ai même mis du sucre, cette fois, ajouta Jessica, les yeux plissés par la colère.

— C’est parfait ! Merci, dit-il en lui adressant un sourire franc et lumineux.

Martin observa sa collègue en essayant de garder son attitude provocatrice, mais cela lui était vraiment difficile. Il sentait que quelque chose était en train de changer et il ne savait pas comment le gérer. Il était vraiment intimidé.

À ce moment, une pointe de culpabilité traversa tout de même Jessica, mais elle ne renonça pas.

— Viens, on va s’installer en salle de pause pour discuter un peu, continua-t-elle.

— Ah bon… ? OK, d’accord…

Mince alors, cela veut-il dire que Lisandro a raison ? se questionna Martin avec espoir.

Il la suivit d’un pas enthousiaste et joyeux à l’idée qu’elle s’intéresse enfin à lui. Ils s’installèrent l’un en face de l’autre à la petite table de la cuisine, tandis que Jessica le fixait sans se départir de son sourire.

— Tu veux un café ? proposa Martin, ravi.

— Non, j’en ai déjà pris un, le rembarra Jessica sans cesser de surveiller son collègue.

Martin hocha la tête en avalant une gorgée de son café.

— Je suis un peu surpris par ton accueil, enchaîna-t-il. Qu’est-ce qui a changé ?

— Rien… J’ai juste remarqué qu’on n’avait jamais vraiment pris le temps de discuter depuis qu’on travaille ensemble, répliqua Jessica pour donner le change.

En réalité, elle attendait avec impatience qu’il s’évanouisse.

Martin sirotait son café sans la quitter des yeux, émerveillé par les courbes de son visage et ses grands yeux gris qui pétillaient de malice. Ils continuèrent à échanger quelques mots, avant que Martin ne commence à ressentir un engourdissement bizarre. D’un seul coup, son corps se fit mou et il eut la désagréable impression d’être totalement groggy. Ses yeux le piquèrent et la fatigue le submergea peu à peu, jusqu’à ce qu’il s’écroule sur la table.

— Ça c’est fait, chuchota Jessica en attrapant son téléphone pour appeler sa cousine.

Elle décrocha immédiatement.

— C’est bon ? demanda Charline avec excitation.

— Ouais… il s’est effondré sur la table.

— Parfait ! Maintenant va prévenir Christian, je me charge du reste.

Jessica acquiesça, avant de raccrocher. Elle n’avait pas envie de laisser Martin tout seul en salle de pause, alors elle appela Christian sur son portable. Elle ne l’appelait jamais, mais elle avait quand même gardé son numéro, au cas où…

— Pourquoi tu m’appelles sur mon portable ? grogna Christian en décrochant.

— Heu… Martin s’est évanoui en salle de pause. J’ai appelé une ambulance, mentit-elle. Je ne voulais pas le laisser seul…

Il y eut un silence de quelques secondes, avant que Christian ne reprenne la parole.

— Qu’est-ce qui s’est passé ? demanda-t-il avec suspicion.

— Rien du tout…, bredouilla Jessica qui sentait le poids de la culpabilité sur sa poitrine. Il buvait son café et, d’un seul coup, il s’est écroulé sur la table.

— Très bien, j’arrive ! s’exclama Christian avant de raccrocher.

Le cœur de Jessica se mit à battre à cent à l’heure. Elle avait soudain chaud et la peur la paralysa quelques secondes. Elle chercha un plan, quelque chose, n’importe quoi ! Puis elle posa les yeux sur le gobelet de café. Elle le saisit précipitamment et se leva pour le jeter. Christian entra juste au moment où elle retournait vers Martin.

— Tu as pris son pouls ? demanda-t-il, ce qui la fit sursauter.

— Heu… non, mais je suis sûre qu’il va bien. Enfin, j’espère…, grimaça-t-elle mal à l’aise.

Christian fronça les sourcils et plissa les yeux en observant Jessica. Mais il ne perdit pas son temps en explication, il se précipita vers son employé pour vérifier s’il respirait encore et si son cœur battait toujours. Si jamais un de ses employés mourrait dans son entreprise, ce serait une catastrophe et une enquête serait ouverte ! Cela pourrait ruiner sa boîte.

Pendant ce temps, Jessica surveillait les moindres gestes de Christian avec anxiété.

— Alors ? demanda-t-elle avec angoisse.

— On dirait qu’il dort, répliqua Christian en dévisageant Jessica avec méfiance.

Christian était sur le point de poser d’autres questions à Jessica lorsque deux hommes entrèrent en salle de pause. Ils étaient grands, musclés et portaient un uniforme de secouriste.

— On nous a signalé un malaise, commença le premier d’un ton très convaincant.

— Oui, c’est pour lui, répliqua Jessica avec empressement.

— Retourne à ton poste, lui intima Christian. Je m’occupe des formalités.

Jessica paniqua un peu. Elle ne savait pas si ces deux mecs connaissaient les « formalités » en cas de malaise, mais elle ne discuta pas. Elle se dépêcha de retourner à son bureau pour appeler Charline.

— Tout s’est bien passé ? demanda sa cousine en décrochant

Le cœur de Jessica battait à cent à l’heure. Elle avait une trouille bleue.

— J’en sais rien. Christian m’a dit de retourner travailler pendant qu’il s’occupait des formalités. Est-ce que tes gars savent comment ça se passe normalement ?

— J’espère, répondit simplement Charline.

— Putain, Charline ! Tu m’avais dit que tu avais tout prévu ! Si je me fais pincer pour de simples papiers, ça ne valait pas le coup. Merde ! Je vais me faire virer par ta faute et par ta négligence !

— Ça va, calme-toi. Ils ont des papiers, je me suis un minimum renseignée, d’accord ?

Jessica soupira pour relâcher la pression.

— OK, désolée. Je suis un peu stressée, c’est tout…

— Sans blague ! rigola Charline. Rejoins-moi dès que tu peux. Allez, détends-toi, ça va être drôle.

Jessica acquiesça, mais n’arriva pas à se détendre. Elle regarda par la fenêtre de son bureau et vit l’ambulance partir. Quand elle se retourna, Christian la rejoignait.

— Alors ? demanda-t-elle avec angoisse.

— On en saura plus dans quelques heures, se contenta de répondre Christian. Tu as bien fait d’appeler une ambulance avant de me prévenir.

Jessica hocha la tête.

— Est-ce que je peux prendre ma journée ? continua-t-elle. Tout ça m’a un peu chamboulée…

— Bien sûr, accepta Christian en lui pressant affectueusement le bras.

C’était vraiment rare qu’il lui montre un signe d’affection, mais elle savait qu’il l’aimait bien dans le fond.

— Tu l’aimes bien finalement cet imbécile, se moqua Christian en ressortant du bureau.

Si seulement il savait la vérité…

Jessica en eut quelques sueurs froides, mais elle se reprit aussitôt. Elle ramassa ses affaires et se précipita jusqu’à sa voiture. Il lui fallut une bonne heure pour rejoindre le studio de Charline qui se trouvait à Paris. Une bonne demi-heure supplémentaire pour trouver une place et quinze minutes de marche pour arriver devant l’entrée du studio. Les rues étaient bondées de voitures et de passants qui couraient dans tous les sens, sans compter les vélos qui slalomaient entre les voitures. C’était vraiment difficile de rester zen dans cette ambiance parisienne. Elle détestait cette impression que tout s’accélérait dès qu’on arrivait dans la capitale.

L’immeuble parisien était quelconque. On n’aurait jamais pu se douter qu’il abritait un immense entrepôt de gadgets tous plus farfelus les uns que les autres.

Elle envoya un SMS à Charline qui vint lui ouvrir quelques secondes plus tard.

— Entre, dépêche-toi ! s’enthousiasma sa cousine qui avait l’air surexcité. Il est arrivé il y a une heure, on a presque fini de tout installer.

— Je commence à regretter, lâcha Jessica en suivant Charline qui avançait au pas de course.

— Arrête de dire des bêtises ! rouspéta Charline.

Une foule de personnes grouillaient autour d’eux et faisaient fonctionner un tas de trucs bizarres. Le plus impressionnant était une tête de dinosaure qui lui ficha la trouille.

— C’est pour quoi ça ? se risqua à demander Jessica.

— Jurassic World, ils nous ont commandé quelques modèles pour le prochain film.

— Putain, c’est dingue ! s’exclama Jessica. Tu travailles pour les États-Unis ?

— Parfois… On est un gros studio, tu sais.

Jessica acquiesça avec émerveillement tout en continuant à suivre les pas rapides de sa cousine. Elles traversèrent encore quelques box qui contenaient des choses improbables, dont certaines en mouvement, pour arriver enfin devant la réplique d’une chambre d’hôpital.

Martin était inconscient sur un lit. Charline expliqua à Jessica ce qu’elle avait fait, de la fausse perfusion fixée à son bras, au faux ventre de femme enceinte. Un assistant était en train de peaufiner les raccords de peau pour que tout soit le plus naturel possible.

— Et quand j’appuie sur ce bouton, continua Charline, le ventre bouge.

Et le ventre fixé à Martin se mit à bouger, comme s’il y avait un vrai bébé à l’intérieur.

— C’est fou, on dirait un vrai…, bredouilla Jessica épatée.

Charline se contenta de sourire.

— Au fait, ce mec est peut-être un abruti fini, mais il est sacrément bien foutu, je devais te le dire, continua Charline.

— Ah bon ? s’étonna Jessica.

Charline hocha la tête avec une moue qui appuyait ses propos, mais Jessica choisit de l’ignorer. En aucun cas, elle ne voulait s’étendre sur ce sujet. Martin ne lui plairait JAMAIS, un point c’est tout !

— On dirait qu’il se réveille, déclara soudain l’assistant.

Il avait l’air très jeune. Peut-être dix-huit ans. Il était plutôt bien portant et habillé d’un jogging trop grand pour lui.

— OK. Tout le monde est en place ? demanda Charline.

L’assistant fit encore quelques retouches de maquillage, avant de ranger tout son matériel, tandis qu’un autre homme habillé en médecin se positionnait près de Martin.

— C’est bon pour moi, dit-il avec un grand sourire.

Jessica faillit s’étrangler en reconnaissant celui qui avait joué dans de nombreux films américains et qui incarnait un super héros avec une armure en acier.

— Putain, comment t’as fait ? chuchota-t-elle à Charline.

— Je lui ai dit que je lui présenterai ma cousine qui est mannequin, rigola Charline en faisant un clin d’œil à Jessica.

Jessica manqua de s’étouffer.

— Tiffany n’acceptera jamais…, hésita-t-elle.

— Tu paries ?

— Mais elle va bientôt se marier, continua Jessica en imaginant sa sœur avec l’homme qui se trouvait face à elle.

Une pointe de jalousie la traversa.

— C’est bon il se réveille, la coupa Charline pour changer de sujet. Et… action !

Jessica et Charline allèrent se planquer dans le bureau de Charline pour surveiller la scène à travers la caméra qu’elle avait postée dans la salle. Sur le coup, Jessica ne réfléchit pas au fait que cela constituait une preuve de sa culpabilité, elle regarda simplement la scène.


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